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Didier Fassin
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Une étrange défaite : Sur le consentement à l'écrasement de Gaza
Didier Fassin
- La découverte
- 5 Septembre 2024
- 9782348085376
Avec le recul du temps, les événements qui, après l'attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre 2023, se sont déroulés en Palestine et leur réception dans une grande partie des lieux de pouvoir, tant politiques qu'intellectuels, de la planète apparaîtront à la lumière crue de leur signification : plus que l'abandon d'une partie de l'humanité, dont la réalpolitique internationale a donné maints exemples récents, c'est le soutien apporté à sa destruction que retiendra l'histoire.
Cet acquiescement à la dévastation de Gaza et au massacre de sa population par l'État d'Israël, à quoi s'ajoute la persécution des habitants de Cisjordanie, a suscité l'indignation de celles et ceux qui, tout en condamnant les actes sanglants ayant déclenché l'offensive, rappelaient les décennies de spoliation, de violence et d'humiliation qui les avait précédés et refusaient la poursuite de l'écrasement d'un peuple et de l'effacement de sa mémoire. Mais on les a stigmatisés et réprimés. Une police de la pensée s'est imposée. Le détournement des mots et l'inversion des valeurs ont mis à l'épreuve l'intelligence politique et le discernement moral. Ce livre propose une archive et une analyse de cette abdication historique. -
Au fil des ans, les crises semblent se multiplier : crise financière, crise sanitaire, crise environnementale, crise des exilés, crise du patriarcat, crise de la démocratie, et selon certains même, crise du capitalisme et du néolibéralisme – la liste pourrait encore s’allonger. La crise deviendrait-elle la nouvelle normalité du monde contemporain, au risque de ne susciter de réponses que dans l’urgence ? Le choix fait dans ce livre est de parler plutôt de moment critique appelant une réflexion collective attentive aux grandes questions du temps présent comme prélude à d’autres formes de vie.
Chaque section ouvre des perspectives sur les principaux enjeux auxquels la société française doit faire face, les lignes politiques qui la traversent, les mondes sociaux qui s’y côtoient, les inégalités qui la divisent, les reconnaissances qui en enrichissent la compréhension et les explorations en quête d’alternatives. De la mondialisation au populisme, des migrations aux pandémies, des discriminations aux communs, de la laïcité à la désobéissance, des plateformes numériques à l’économie solidaire, c’est un regard lucide qui est porté sur les transformations définissant notre monde.
Ni état des lieux ni exercice de futurologie, ce livre est une interrogation critique sur notre temps pour anticiper la société qui vient.
Didier Fassin est professeur à l’Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales. Il a récemment publié au Seuil Punir. Une passion contemporaine, La Vie. Mode d’emploi critique et Les Mondes de la santé publique. Pour le présent projet, il a réuni soixante-sept autrices et auteurs de renom en science politique, économie, droit, histoire, sociologie, anthropologie, géographie, démographie, philosophie et littérature. -
L'Empire du traumatisme : Enquête sur la condition de victime
Richard Rechtman
- Flammarion
- Champs
- 30 Octobre 2024
- 9782080475015
Depuis la fin du XX siècle, le traumatisme s'est imposé comme un mode dominant d'interprétation du malheur et de reconnaissance des victimes, qu'il s'agisse d'attentats ou d'accidents, de violences physiques ou d'abus sexuels, de massacres de populations ou de catastrophes environnementales. Pourtant, il avait longtemps servi à disqualifier les soldats commotionnés et les ouvriers blessés dont l'authenticité de la souffrance était mise en doute. Si la psychiatrie contemporaine, appuyée par des mobilisations sociales, a mis un terme à cette suspicion en établissant une catégorie clinique légitime, la notion de traumatisme s'est déployée dans l'ensemble du monde social, s'inscrivant dans des rapports de pouvoir et des enjeux de justice qui peuvent occulter des inégalités et produire des hiérarchies d'humanité.
De la victimologie psychiatrique après l'explosion de l'usine AZF à Toulouse à la psychiatrie humanitaire en Palestine durant la seconde Intifada, en passant par la psycho-traumatologie de l'exil auprès des demandeurs d'asile, cet essai explore trois lieux, trois formes d'intervention pour mettre au jour l'économie morale et les usages politiques du traumatisme. Ce faisant, il met en lumière la manière dont nos sociétés pensent leur responsabilité à l'égard des désordres du monde et les dispositifs imaginés pour y faire face. -
L'exil, toujours recommencé : Chronique de la frontière
Anne-claire Defossez
- Seuil
- La Couleur des idées
- 5 Janvier 2024
- 9782021549706
Anthropologue et médecin, Didier Fassin est professeur au Collège de France, titulaire de la chaire Questions morales et enjeux politiques dans les sociétés contemporaines, et directeur d'études à l'EHESS. Anne-Claire Defossez est sociologue, chercheure à l'Institute for Advanced Study de Princeton.Fuyant les violences politiques, les persécutions religieuses ou la pauvreté, des hommes, des femmes, des enfants d'Afghanistan, d'Iran, du Maghreb et d'Afrique subsaharienne, se mettent en route pour des voyages de plusieurs années au cours desquels ils affrontent les rackets des bandes armées, les brutalités des polices, les camps d'enfermement, les murs de barbelés, les rigueurs du désert, les périls de la mer. Beaucoup y perdent la vie.
Cinq années durant, été comme hiver, Didier Fassin et Anne-Claire Defossez ont mené une recherche à la frontière entre l'Italie et la France, dans les Alpes, auprès de nombre de ces exilés, pour reconstituer leur périple en l'inscrivant dans le contexte géopolitique des bouleversements du monde. Ils ont pris part aux activités menées pour leur porter assistance. Ils ont rencontré les multiples acteurs de ce territoire de migrations millénaires.
Leur enquête donne ainsi à comprendre l'expérience des exilés, l'engagement des volontaires et même
le désarroi des forces de l'ordre, conscientes de la vanité de leur mission. Elle dévoile l'inefficacité d'une militarisation de la frontière qui rend plus dangereuse la traversée de la montagne et d'une politique qui nie les droits de personnes en quête de protection. -
Au cours des dernières décennies, la plupart des sociétés se sont faites plus répressives, leurs lois plus sévères, leurs juges plus inflexibles, et ceci sans lien direct avec l'évolution de la délinquance et de la criminalité. Dans ce livre, qui met en oeuvre une approche à la fois généalogique et ethnographique, Didier Fassin s'efforce de saisir les enjeux de ce moment punitif en repartant des fondements mêmes du châtiment.
Qu'est-ce que punir ? Pourquoi punit-on ? Qui punit-on ? À travers ces trois questions, il engage un dialogue critique avec la philosophie morale et la théorie juridique. Puisant ses illustrations dans des contextes historiques et nationaux variés, il montre notamment que la réponse au crime n'a pas toujours été associée à l'infliction d'une souffrance, que le châtiment ne procède pas seulement des logiques rationnelles servant à le légitimer et que l'alourdissement des peines a souvent pour résultat de les différencier socialement, et donc d'accroître les inégalités.
À rebours du populisme pénal triomphant, cette enquête propose une salutaire révision des présupposés qui nourrissent la passion de punir et invite à repenser la place du châtiment dans le monde contemporain.
Didier Fassin est professeur de sciences sociales à l'Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d'études à l'EHESS. Il est notamment l'auteur, au Seuil, de La Force de l'ordre (2011) et de L'Ombre du monde (2015).
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L'ombre du monde ; une anthropologie de la condition carcérale
Didier Fassin
- Seuil
- La Couleur des idées
- 8 Janvier 2015
- 9782021179606
Invention récente puisqu'elle n'a guère plus de deux siècles, la prison est devenue, partout dans le monde, la peine de référence. L'atteste, en France, le doublement de la population carcérale au cours des trois dernières décennies. Comment comprendre la place qu'elle occupe dans la société contemporaine ? Et comment expliquer que le tournant punitif affecte avec une telle intensité certaines catégories de personnes ? Pour tenter de répondre à ces questions, Didier Fassin a conduit au long de quatre années une enquête dans une maison d'arrêt.
Analysant l'ordinaire de la condition carcérale, il montre comment la banalisation de l'enfermement a renforcé les inégalités socio-raciales et comment les avancées des droits se heurtent aux logiques d'ordre et aux pratiques sécuritaires. Mais il analyse aussi les attentions et les accommodements du personnel pénitentiaire, les souffrances et les micro-résistances des détenus, la manière dont la vie au dedans est traversée par la vie du dehors. La prison apparaît ainsi comme à la fois le reflet de la société et le miroir dans lequel elle se réfléchit. Plutôt que l'envers du monde social, elle en est l'inquiétante ombre portée.
Didier Fassin est professeur de sciences sociales à l'Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d'études à l'EHESS. Il a notamment publié La Force de l'ordre (Seuil, 2011) et La Raison humanitaire (Hautes Études-Gallimard-Seuil, 2010).
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La force de l'ordre
Frédéric Debomy, Jake Raynal
- Delcourt
- Seuil - Delcourt
- 21 Octobre 2020
- 9782413032809
Une saisissante enquête anthropologique auprès de policiers en banlieue parisienne. L'engrenage terrible de l'ennui, de la pression du chiffre et des éruptions de violence... adapté d'un essai qui fit date.
D. Fassin a partagé pendant deux ans le quotidien d'une brigade anti-criminalité. Loin des imaginaires du cinéma ou des séries, il raconte l'ennui des patrouilles, la pression du chiffre, les formes invisibles de violence et les discriminations. Cette enquête « ethno-graphique » montre à quel point les habitants de ces quartiers restent soumis à une forme d'exception sécuritaire. -
La recherche à l'épreuve du politique
Didier Fassin
- Textuel
- Textuel Idées Débats
- 11 Janvier 2023
- 9782845979338
Quand la recherche se révèle être une épreuve à risque. Éric Fassin met ici en lumière la part de risque à laquelle s'exposent les chercheurs et chercheuses en sciences sociales. Il s'appuie pour cela sur son expérience personnelle en France mais aussi sur celles de chercheurs mis en danger pour des raisons politiques à l'international. Il nous alerte sur le risque d'autocensure qui en découle.
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Écologique, sanitaire, énergétique, économique, sociale, humanitaire, démocratique : les crises sont une composante essentielle du monde contemporain. Si les sciences sociales peuvent aider à les comprendre et à les résoudre, leur rôle est également d'interroger le langage de la crise, d'analyser l'écart ou la convergence entre la réalité et sa représentation : nommer ou taire une crise, l'exagérer ou la minimiser sont autant de procédés générateurs d'affects, de temporalités, d'omissions aux conséquences majeures qu'une pensée critique se doit de décrypter. S'appuyant à la fois sur les trajectoires de vie de figures célèbres des sciences humaines et sur des recherches conduites autour de faits éloquents du présent, cette leçon inaugurale, qui s'adresse à toute citoyenne et tout citoyen, pose les jalons d'une vaste réflexion éthique et politique dont l'époque ne cesse de démontrer la nécessité.
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De la question sociale à la question raciale ? représenter la société française
Didier Fassin, Eric Fassin
- La découverte
- Poche / Sciences humaines et sociales
- 12 Décembre 2013
- 9782707159939
On n'ignorait pas le racisme, mais on découvre combien les discriminations raciales, dans l'emploi, le logement et à l'école, face à la police et à la justice, structurent des inégalités sociales. Un passionnant collectif d'auteurs, à l'heure des nombreux débats sur les statistiques ethniques. (Cette édition numérique reprend, à l'identique, la deuxième édition de 2009.)
Aujourd'hui, la question raciale vient apporter un démenti aux discours qui se réclament de l'universalisme républicain ; mais elle ne permet pas davantage de représenter la société exclusivement en termes de classes. À l'ombre des émeutes urbaines de l'automne 2005, c'est la représentation d'une France racialisée qui depuis s'est imposée dans le débat public. On n'ignorait pas le racisme ; on découvre combien les discriminations raciales, dans l'emploi, le logement et à l'école, face à la police et à la justice, structurent des inégalités sociales. En retour, se font jour des identifications ainsi que des tensions dans le langage politique de la race, naguère encore interdit de cité. Faut-il donc parler de races, ou pas ? Comment nommer ces réalités sans stigmatiser les groupes qu'elles désignent ? Doit-on se réjouir que les discriminations raciales soient enfin révélées, ou bien se méfier d'un consensus trompeur qui occulterait des inégalités économiques ? D'ailleurs, en a-t-on vraiment fini avec le déni du racisme ? Les études réunies dans ce livre composent un éloge de la complexité, autour d'un engagement problématisé : comment articuler, plutôt que d'opposer, question sociale et question raciale ? Une nouvelle préface vient confirmer les déplacements repérés trois ans plus tôt : l'émergence d'une " question raciale " - et plus seulement " raciste " - ou " immigrée ", qui croise la " question sociale " sans s'y réduire, interroge désormais l'ensemble des paradigmes qui sous-tendent les représentations de la société française. (Cette édition numérique reprend, à l'identique, la deuxième édition de 2009.) -
Les mondes de la santé publique : excursions anthropologiques ; cours au collège de France 2020-2021
Didier Fassin
- Seuil
- La Couleur des idées
- 2 Septembre 2021
- 9782021486124
Avec la pandémie de covid, la santé publique, domaine jusqu'alors méconnu, a fait irruption dans le monde. Tout ce qui fait le mouvement des sociétés s'est brusquement mis à tourner autour des questions sanitaires. Pour inscrire ce moment dans un cadre plus vaste, le cours au Collège de France qui fournit la matière de ce livre propose un détour en partant d'une scène ordinaire, celle du saturnisme infantile, pour, au fil des leçons, en décliner les enjeux à travers une série d'études de cas menées sur trois continents.
La vérité du chiffre invite à réfléchir à la manière dont le travail de quantification prétend représenter les faits sociaux et sanitaires. Les frontières épistémiques interrogent la confrontation de conceptions profanes et savantes de la maladie. Les thèses conspirationnistes révèlent des réactions de défiance à l'égard des savoirs autorisés et des pouvoirs officiels. Les crises éthiques dévoilent des mécanismes de violation des droits et de détournement des biens communs au bénéfice d'intérêts privés. Quant aux enquêtes portant sur les exils précaires et les épreuves carcérales, elles permettent d'appréhender la généalogie et la sociologie de l'administration des populations vulnérables. Chacun de ces enjeux jette un éclairage singulier sur l'expérience pandémique.
Au terme de ces excursions anthropologiques, la santé publique peut apparaître à la fois comme un miroir tendu à la société et un reflet que cette dernière lui renvoie.Anthropologue, sociologue et médecin, Didier Fassin est professeur à l'Institute for Advanced Study de Princeton, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales et titulaire de la chaire de santé publique du Collège de France en 2020-2021. Il a récemment publié au Seuil La Vie mode d'emploi critique et Mort d'un voyageur. Une contre-enquête. -
Faire de la santé publique
Didier Fassin
- Hygée Editions/ Presses de l'EHESP
- 21 Septembre 2023
- 9782810911226
L'ambition de cette 3e édition est de montrer comment des idées naissent, des instruments se forgent, des acteurs se mobilisent pour faire exister et reconnaître des réalités : les « problèmes de santé publique ». Une nouvelle préface souligne la façon dont la pandémie de Covid a simultanément donné une présence inédite à la santé publique.
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Mort d'un voyageur ; une contre-enquête
Didier Fassin
- Seuil
- La Couleur des idées
- 12 Mars 2020
- 9782021450781
C'est une histoire simple. Un homme de trente-sept ans appartenant à la communauté du voyage est abattu dans la ferme familiale par des gendarmes du GIGN alors qu'il n'a pas réintégré la prison après une permission de sortir. Deux versions des faits s'affrontent : celle des militaires, qui invoquent la légitime défense, et celle des parents présents sur les lieux, qui la contestent. Une information judiciaire est ouverte, qui se conclut par un non-lieu, confirmé en appel. La famille et ses soutiens continuent pourtant de se battre, réclamant justice et vérité. Réexaminant les pièces du dossier et interrogeant les protagonistes du drame, Didier Fassin présente ici une contre-enquête qui accorde le même crédit à tous les récits.
Pour en rendre compte, Mort d'un voyageur propose une forme expérimentale de narration qui s'attache d'abord à restituer scrupuleusement par une écriture subjective la manière dont chacun affirme avoir vécu les événements, puis à croiser les témoignages et les expertises en intégrant l'ensemble des éléments disponibles pour aboutir à une autre lecture des faits. Réflexion critique sur les conditions de possibilité de telles tragédies, cette recherche contribue à rendre aux voyageurs un peu de ce dont la société les prive : la respectabilité.
Didier Fassin est professeur à l'Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d'études à l'EHESS. Titulaire d'une chaire annuelle du Collège de France, il est notamment l'auteur, au Seuil, de Punir. Une passion contemporaine et La Vie. Mode d'emploi critique.
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« Comment traite-t-on les vies ? Que fait-on des morts ? Ou plutôt, que dit d'une société la manière dont elle considère certaines vies, vies de travailleurs, vies d'exilés, vies de prisonniers, vies rendues vulnérables, inégales ? Et que révèlent de ses valeurs la façon dont meurent certains de ces travailleurs, certains de ces exilés ou certains de ces prisonniers, la façon dont on les laisse mourir ou dont on les expose à la mort, la façon dont on détourne les yeux de leur condition ou dont on se mobilise pour les protéger ? Au fond, comment se définissent les économies morales de la vie et de la mort dans le monde contemporain ? Telles sont les questions posées dans ce livre à propos de trois objets au regard desquels elles s'avèrent particulièrement pertinentes : le travail, l'exil et la prison. Ce choix n'est pas neutre. Il vise à éclairer des lieux où, souvent, la précarité des vies est rendue invisible et la douleur des morts indicible. » Issu du colloque qui s'est tenu au Collège de France en juin 2021, ce volume réunit des anthropologues, des historiens et des sociologues dont le travail tant empirique que théorique interroge avec force et clarté les problématiques fondamentales de notre société.
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La vie ; mode d'emploi critique
Didier Fassin
- Seuil
- La Couleur des idées
- 11 Janvier 2018
- 9782021374728
Comment concevoir la vie dans sa double dimension du vivant et du vécu, de la matière et de l'expérience ? À cette question, la philosophie et, plus récemment, les sciences sociales, ont apporté toutes sortes de réponses, privilégiant souvent l'une ou l'autre de ces dimensions – le biologique ou le biographique. Est-il toutefois possible de les penser ensemble et de réconcilier ainsi les approches naturaliste et humaniste ? S'appuyant sur une série de recherches conduites sur trois continents, Didier Fassin s'y emploie en mobilisant trois concepts : les formes de vie, les éthiques de la vie et les politiques de la vie.
Dans la condition des réfugiés et des demandeurs d'asile, à travers le geste humanitaire et le sacrifice pour une cause, à la lumière des statistiques de mortalité et des modalités de calcul des indemnités de décès, à l'épreuve, enfin, d'une enquête généalogique et ethnographique, l'économie morale de la vie révèle de troublantes tensions dans la manière dont les sociétés contemporaines traitent les êtres humains.
Une fois assemblées, comme dans un puzzle, les pièces de cette composition anthropologique, une image apparaît : celle, troublante, des vies inégales.
Didier Fassin est professeur à l'Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d'études à l'EHESS. Il est notamment l'auteur, au Seuil, de La Raison humanitaire, La Force de l'ordre, L'Ombre du monde et Punir. Une passion contemporaine.
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Le Monde à l'épreuve de l'asile : Essai d'anthropologie critique
Didier Fassin
- Société d´ethnologie
- 13 Novembre 2023
- 9782365190572
Le problème des réfugiés, qui se pose avec acuité depuis un siècle, a connu au cours de la période récente de tragiques développements en raison de l'accroissement de la population fuyant les guerres, les persécutions, les catastrophes et la paupérisation, mais aussi et surtout à cause des réactions d'hostilité et de rejet observées en maints endroits de la planète. Ayant conduit pendant une quinzaine d'années des enquêtes sur l'asile en France et plus récemment en Afrique du Sud, Didier Fassin propose de reconsidérer ce que nous croyons savoir mais ne parvenons plus à penser autour de cette « question réfugiée » à travers une triple approche : généalogique, afin de remonter aux origines de l'asile ; géographique, pour rendre compte de la mondialisation de ses enjeux ; ethnographique, en s'attachant aux pratiques ordinaires d'octroi de la protection. Il révèle ainsi les intermittences de l'hospitalité, l'inégale distribution des réfugiés entre les nations et les profondes mutations de l'économie morale de l'asile. La forme de vie imposée aux nomades forcés devient ainsi une clé de lecture du monde contemporain.
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La question morale ; une anthologie critique
Samuel Lézé
- PUF
- Hors collection
- 31 Janvier 2014
- 9782130625186
Si l'anthropologie ne cesse de parler de morale, peu d'auteurs ont tenté de thématiser la « question morale » en tant que telle. L'omniprésence contemporaine de cette question exige pourtant de réfléchir à cet impensé des sciences sociales. C'est à ce travail de problématisation des diverses dimensions de la morale que cette anthologie critique se consacre en rassemblant, traduisant et présentant les textes qui ont jalonné un domaine de recherche en plein essor : l'anthropologie morale. Cinq parties adossées chacune à une discussion critique organisent le volume. L'ouvrage reconstitue ainsi la généalogie qui mène de la philosophie morale à la constitution d'une science morale et sociale ; réunit les principales tentatives anthropologiques de penser la morale, entre relativisme et universalisme ; développe les concepts importants de morales locales et d'économies morales ; analyse la rencontre entre les anthropologues et la morale telle qu'ils la découvrent sur le terrain ; et enfin explicite l'éthique de l'anthropologie et les paradoxes moraux des codifications éthiques actuelles.
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« Il y a, d'un côté, la vie qui s'écoule avec un commencement et une fin, et de l'autre, la vie qui fait la singularité humaine parce qu'elle peut être racontée. On pourrait ainsi parler de vie biologique et de vie biographique. L'espérance de vie mesure l'étendue de la première. L'histoire de vie relate la richesse de la seconde. L'inégalité des vies ne peut être appréhendée que dans la reconnaissance des deux. Elle doit à la fois les distinguer et les connecter. Les distinguer, car le paradoxe des femmes françaises montre qu'une vie longue ne suffit pas à garantir une vie bonne. Les connecter, car l'expérience des hommes afro-américains rappelle qu'une vie dévalorisée finit par produire une vie abîmée. C'est ainsi que se pose également la question des réfugiés et des migrants. »
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Quand les corps se souviennent
Didier Fassin
- La découverte
- Armillaire
- 12 Décembre 2013
- 9782707178817
Quels sont les enjeux politiques d'une crise épidémiologique qui met en cause les discours de la science autant que la gestion du pouvoir ? Un prisme original pour lire l'histoire récente de l'après-apartheid.
Avec six millions de personnes infectées, l'Afrique du Sud est le pays du monde le plus gravement touché par l'épidémie de sida. Elle est aussi le lieu des débats les plus virulents sur les causes et les traitements de la maladie, des mobilisations les plus spectaculaires et des procès les plus retentissants pour l'accès aux médicaments. Que ces faits surviennent dans le contexte de l'après-apartheid, dans une " nouvelle Afrique du Sud " où la reconstruction d'une " nation arc-en-ciel " affranchie des barrières raciales semblait enfin possible, confère à cette situation une tonalité particulièrement dramatique. En ce sens, la chronique sud-africaine du sida, de ses morts annoncées et de ses polémiques incessantes, forme le contrepoint de la Commission vérité et réconciliation, qui s'est efforcée de solder un héritage douloureux. Fruit de cinq années d'enquête dans les townships et les anciens homelands comme dans les milieux savants et politiques sud-africains, ce livre retrace les enjeux politiques d'une crise épidémiologique qui met en cause les discours de la science autant que la gestion du pouvoir : il montre, à partir des biographies de malades et de l'anatomie des controverses, comment l'histoire de la colonisation et de la ségrégation demeure vivante, dans les inégalités et les violences, dans le racisme et les accusations de racisme. Le passé est intensément présent, se dévoilant sans cesse à travers une politique de la souffrance et une économie du ressentiment. Il s'agit donc ici de comprendre, de la manière la plus littérale, comment les corps se souviennent. Au-delà de la singularité historique de l'Afrique du Sud, l'auteur propose ainsi une réflexion sur la mémoire des afflictions collectives dans les sociétés contemporaines et sur l'anesthésie politique que perpétue notre indifférence à l'égard de ces injustices. -
L'Espace politique de la santé
Didier Fassin
- Presses universitaires de France (réédition numérique FeniXX)
- Sociologie d'aujourd'hui
- 11 Septembre 2015
- 9782130675822
La maladie n'est pas seulement un événement biologique qui affecte l'individu et mobilise le savoir médical. Elle est aussi une réalité sociale qui met en jeu des rapports de pouvoir. Elle les exprime dans les multiples manières dont l'ordre social s'inscrit dans les corps, à travers les disparités face aux risques de l'existence, aux possibilités de se soigner et, finalement, à la mort. Elle les révèle dans l'intervention de ceux que l'on crédite de la capacité de guérir, qu'ils soient chamanes, marabouts, prêtres ou médecins, tout autant que dans les interactions entre les professions de santé et les pouvoirs publics. Elle les dévoile enfin dans la recherche de réponses collectives aux désordres corporels, rituels de purification ou programmes de prévention, dont la réalisation représente toujours un test pour l'autorité, celle du devin comme celle de l'État. Incorporation de l'inégalité, pouvoir de guérir et gouvernement de la vie constituent ainsi les trois dimensions de ce que l'on se propose de nommer l'espace politique de la santé. En s'efforçant de penser ensemble des mondes éloignés temporellement et culturellement, en s'appuyant sur des travaux d'ethnologues, d'historiens et de sociologues, et aussi sur des recherches personnelles, il s'agit de montrer comment cet espace s'est construit. D'en établir, en somme, la généalogie. Mais, au-delà de cette reconstitution, l'ouvrage est également une invitation à explorer un territoire en plein développement et pourtant encore peu visité, aux frontières du politique et de la santé.
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Most incidents of urban unrest in recent decades - including the riots in France, Britain and other Western countries - have followed lethal interactions between the youth and the police. Usually these take place in disadvantaged neighborhoods composed of working-class families of immigrant origin or belonging to ethnic minorities. These tragic events have received a great deal of media coverage, but we know very little about the everyday activities of urban policing that lie behind them. Over the course of 15 months, at the time of the 2005 riots, Didier Fassin carried out an ethnographic study in one of the largest precincts in the Paris region, sharing the life of a police station and cruising with the patrols, in particular the dreaded anti-crime squads. Far from the imaginary worlds created by television series and action movies, he uncovers the ordinary aspects of law enforcement, characterized by inactivity and boredom, by eventless days and nights where minor infractions give rise to spectacular displays of force and where officers express doubts about the significance and value of their own jobs. Describing the invisible manifestations of violence and unrecognized forms of discrimination against minority youngsters, undocumented immigrants and Roma people, he analyses the conditions that make them possible and tolerable, including entrenched policies of segregation and stigmatization, economic marginalization and racial discrimination. Richly documented and compellingly told, this unique account of contemporary urban policing shows that, instead of enforcing the law, the police are engaged in the task of enforcing an unequal social order in the name of public security.
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How can we think of life in its dual expression, matter and experience, the living and the lived? Philosophers and, more recently, social scientists have offered multiple answers to this question, often privileging one expression or the other - the biological or the biographical. But is it possible to conceive of them together and thus reconcile naturalist and humanist approaches? Using research conducted on three continents and engaging in critical dialogue with Wittgenstein, Benjamin, and Foucault, Didier Fassin attempts to do so by developing three concepts: forms of life, ethics of life, and politics of life.
In the conditions of refugees and asylum seekers, in the light of mortality statistics and death benefits, and via a genealogical and ethnographical inquiry, the moral economy of life reveals troubling tensions in the way contemporary societies treat human beings. Once the pieces of this anthropological composition are assembled, like in Georges Perec's jigsaw puzzle, an image appears: that of unequal lives. -
The prison is a recent invention, hardly more than two centuries old, yet it has become the universal system of punishment. How can we understand the place that the correctional system occupies in contemporary societies? What are the experiences of those who are incarcerated as well as those who work there? To answer these questions, Didier Fassin conducted a four-year-long study in a French short-stay prison, following inmates from their trial to their release. He shows how the widespread use of imprisonment has reinforced social and racial inequalities and how advances in civil rights clash with the rationales and practices used to maintain security and order. He also analyzes the concerns and compromises of the correctional staff, the hardships and resistance of the inmates, and the ways in which life on the inside intersects with life on the outside. In the end, the carceral condition appears to be irreducible to other forms of penalty both because of the chain of privations it entails and because of the experience of meaninglessness it comprises. Examined through ethnographic lenses, prison worlds are thus both a reflection of society and its mirror. At a time when many countries have begun to realize the impasse of mass incarceration and question the consequences of the punitive turn, this book will provide empirical and theoretical tools to reflect on the meaning of punishment in contemporary societies.
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It is a simple story. A 37-year-old man belonging to the Traveller community is shot dead by a special unit of the French police on the family farm where he was hiding since he failed to return to prison after temporary release. The officers claim self-defense. The relatives, present at the scene, contest that claim. A case is opened, and it concludes with a dismissal that is upheld on appeal. Dismayed by these decisions, the family continues the struggle for truth and justice. Giving each account of the event the same credit, Didier Fassin conducts a counter-investigation, based on the re-examination of all the available details and on the interviews of its protagonists. A critical reflection on the work of police forces, the functioning of the justice system, and the conditions that make such tragedies possible and seldom punished, Death of a Traveller is also an attempt to restore to these marginalized communities what they are usually denied: respectability.